Nouveau volet de nos arbitres aux Jeux de Paris !

Nous revenons avec nos différents arbitres pour parler de cette expérience inoubliable !

Voici le dernier volet de nos petites interviews avec nos arbitres présents aux Jeux.

Nous concluons avec Francoise Lapicque, juge-arbitre adjointe lors de ces Jeux Paralympiques, qui repart avec des étoiles plein les yeux !

Comment vous êtes-vous préparé(e) pour juge-arbitrer lors des Jeux Paralympiques de Paris 2024 ?

Pour de tels événements, la préparation est tout d’abord le résultat de plusieurs années d’expérience d’arbitrage et de juge-arbitrage d’événements nationaux et internationaux, pas seulement « para ». J’avais l’avantage de l’expérience de Tokyo 2020 avec les mêmes fonctions de JA adjointe, ce qui m’a permis de partager avec mes collègues de la table des éléments utiles pour assurer les meilleurs Jeux possibles, lors de réunions en visio depuis plus d’un an. Cela nous a permis d’optimiser au mieux les 3 jours sur place avant la compétition, pour régler les derniers détails, effectuer les tirages au sort, accompagner les arbitres dans leur préparation et dans des répétitions pour caler les procédures dans les aires de jeu avec les ramasseurs de balle et tous les bénévoles, mais aussi répondre aux innombrables questions des joueurs, accompagnants…

Qu'est-ce que cela représente pour vous de juge-arbitrer dans votre pays lors d'un événement de cette envergure ?

Beaucoup, bien évidemment ! Du stress positif, pour que tout se passe bien, pendant toutes les journées, pour les joueurs et pour les spectateurs. Et une grande joie à la fin, en gardant plein d’étoiles dans les yeux

Comment trouvez-vous l'interaction avec des athlètes et des arbitres d'autres cultures pendant les Jeux ?

Les interactions entre officiels sont très importantes, sachant que nous avons passé des journées longues ensemble dans la salle (de 8h à 22h en général) : retrouvailles d’anciennes connaissances, nouvelles amitiés. Avec les joueurs, elles sont nécessairement moins proches, pour garder une attitude neutre indispensable à une fonction officielle, avec des athlètes qui sont dans les derniers moments de leur concentration avant d’entamer le match de leur vie.

Egalement des interactions fortes avec tous les bénévoles dévoués, venus du monde entier, qui ont été une aide incroyable pendant ces deux semaines.

Comment gérez-vous la pression et les responsabilités liées à la prise de décisions cruciales durant ces Jeux ?

L’expérience est la meilleure arme pour cela, accompagnée d’une concentration forte nécessaire pour avoir toutes les informations nécessaires à la prise de décision, d’autant plus importante qu’il y a un public nombreux (l’arena de 6700 places était quasiment pleine pour toutes les sessions), enthousiaste, et très expressif sur le plan sonore : entre soutien tonitruant, ovations et ola, il est parfois difficile de tout entendre.

Quelle est la différence notable entre l'arbitrage de joueurs en situation de handicap et celui de joueurs valides ?

La plus grande différence concerne les joueurs en fauteuil, pour lesquels il y a des modifications des règles du jeu (service, contact du fauteuil, en particulier). Pour tous également, il peut y avoir des adaptations, par exemple au service, précisées par le classificateur et qui sont à connaître avant la partie. Toujours avoir à l’esprit que les adaptations doivent être une compensation, mais ne doivent pas conduire à un avantage.

Avez-vous une anecdote intéressante liée à ces interactions multiculturelles ?

Les interactions multiculturelles sont semblables à toute compétition internationale, et se situent au-delà de tous les conflits sur notre planète. Aux Paralympiques, ce qui marque le plus, c’est le côté « normal » du handicap, qui est présent, sans retenue mais sans ostentation, naturel en fait. Je garderai un souvenir inoubliable de la cérémonie d’ouverture qui a mis l’accent sur la « révolution de l’inclusion » sur la place de la Concorde : mon plus grand souhait est que cela se continue dans la vraie vie…

Merci beaucoup Françoise pour ton temps et cette interviews !

Voici un nouveau volet de nos petites interviews avec nos arbitres présents aux Jeux Paralympiques !

Les Jeux Paralympiques se sont terminés dimanche, et nous revenons avec Yohan Declomesnil pour parler de cette expérience inoubliable en tant qu'arbitre aux Jeux de Paris !

Comment vous êtes-vous préparé(e) pour arbitrer lors des Jeux Paralympiques de Paris 2024 ?

Depuis quelques mois, nous avons reçu plusieurs formations, certaines organisées par l’ANS sur différents thèmes comme la gestion du stress, de la pression, sur les enjeux, ou encore le sommeil et la nutrition, et d’autres webinaires gérés par l’organisateur Paris 2024 Tennis de Table. Ces présentations nous ont mis dans des conditions idéales pour se préparer au mieux pour ces JO paralympiques. Il fallait aussi se familiariser avec le logiciel du live scoring sur les tablettes, qui n’est jamais simple à gérer en parallèle de la gestion de la partie. Sur place, nous avions aussi pas mal de rappels sur certains points de règlement et des consignes du Juge-Arbitre. Nous étions présents 3 jours avant le début de la compétition, ce qui nous a permis de nous rassurer sur l’organisation de la compétition et d’anticiper toutes les éventuelles inconnues, notamment sur la restauration et le transport entre le village olympique et le lieu de la compétition. J’ai également pu discuter avec certains collègues qui ont participé aux Jeux Olympiques de cet été pour un partage d’expérience et m’imaginer un peu à quoi cela ressemblerait avec toute cette ferveur autour des JO Paris 2024. Un peu avant la compétition, j’ai également pris quelques jours de vacances afin de bien me reposer et de penser à autre chose tout en profitant de ma famille.

Qu'est-ce que cela représente pour vous d'arbitrer dans votre pays lors d'un événement de cette envergure ?

Arbitrer en France pour la France est un grand honneur et on ne doit aucunement faillir dans notre devoir, d’autant plus qu’il ne s’agit pas d’une compétition ordinaire mais bien des Jeux paralympiques, épreuve que nous ne ferons qu’une seule fois dans notre vie sur notre territoire. Par ailleurs, c’est un peu la première fois que je preste sur une épreuve de cette envergure, donc il y a un peu de pression, d’inconnu, mais il faut profiter de tous ces moments et prendre plaisir à arbitrer. C’est une chance inouïe de pouvoir arbitrer autour de grands champions venus du monde entier en sachant que nous ne sommes que 10 arbitres français sur les 30 internationaux sur ces Jeux Paralympiques. On doit rester « focus », sérieux et appliqué pour ne pas décevoir nos instances qui nous ont fait confiance en nous désignant. Je n’ai d’ailleurs jamais vu une telle ferveur, un tel engouement, un tel public soutenant les athlètes, surtout quand il s’agissait des Français. Cette ambiance était incroyable et indescriptible. On entendait ces bruits depuis l’arrière-scène comme si nous étions sur l’aire de jeu. Il fallait vraiment le voir pour le croire et je ne suis pas prêt d’oublier.

Comment trouvez-vous l'interaction avec des athlètes et des arbitres d'autres cultures pendant les Jeux ?

C’est toujours une opportunité intéressante de découvrir d’autres cultures, surtout avec des joueurs venus des 4 coins de la planète. On échange beaucoup de choses avec les arbitres des autres pays (des coutumes, des styles de vie, mais aussi des souvenirs). En ce qui concerne les joueurs, nous les côtoyons un peu moins durant la compétition du fait de notre fonction qui requiert une certaine distance avec les athlètes, mais cela reste toujours intéressant de découvrir de nouvelles choses. Cela diffère tellement d’une culture à l’autre, d’autant plus avec les handicaps des joueurs. J’ai toujours ces images entre les joueurs, les bénévoles, le public s’échangeant les pins pour tenter d’en avoir le plus possible.

Comment gérez-vous la pression et les responsabilités liées à la prise de décisions cruciales durant ces Jeux ?

C’est toujours compliqué d’aborder ce genre de compétition, car nous sommes toujours stressés. On sait que nous sommes au centre des intérêts avec une énorme visibilité via le public ou sur les réseaux télévisés, sociaux, etc. D’autant plus que nous avions les micros sur les finales. Mais il faut faire abstraction de tout cela et utiliser toute cette pression et ce stress en une énergie positive afin de se focaliser sur la partie à arbitrer en s’imaginant arbitrer une partie classique que l’on fait habituellement. Il faut vraiment rester vigilant durant toute la durée de la partie. Il est vrai que les joueurs ne se font pas de cadeau dans le jeu, mais il y a un énorme respect entre eux, ce qui peut faciliter notre arbitrage. Il faut arbitrer de manière juste, en se référant aux règles en expliquant nos décisions si nécessaire et cela se passe généralement très bien. En même temps, ce sont les joueurs qui sont les acteurs. En tant qu’arbitres, nous ne sommes que spectateurs de leurs incroyables exploits. La première partie est la plus compliquée, car il faut que l’on prenne tous nos repères, puis en faisant abstraction du bruit et en gardant une certaine confiance, cela s’améliore au fur et à mesure des parties.

Quelle est la différence notable entre l'arbitrage de joueurs en situation de handicap et celui de joueurs valides ?

En ce qui concerne les joueurs des classes 6 à 10 (joueurs debout) et classe 11 (handicap mental), il s’agit des mêmes règles que les joueurs valides, si ce n’est quelques petites « tolérances » sur l’exécution d’un service (exemple de lancer la balle avec la raquette pour ceux qui sont amputés d’une main ou d’un bras). Pour les joueurs en fauteuils (classes 1 à 5), il faut faire plus attention aux services, avec une balle à remettre si cette dernière a un effet rétro ou si elle s’immobilise sur la table, et si, en simple, la balle sort par le côté latéral. Il faut également faire attention à ce que l’une de leurs cuisses touche toujours le coussin du fauteuil au moment de frapper la balle. C’est assez simple à comprendre dans la théorie, mais toujours délicat à juger en pratique. Mais il y a un tel respect de l’adversaire que les athlètes nous aident parfois en signalant ces « irrégularités ».

Avez-vous une anecdote intéressante liée à ces interactions multiculturelles ?

Je me rappelle de cette photo selfie des Coréens (du Nord et du Sud) sur le même podium qui, même si elle fait tant parler d’elle dans les médias, doit outrepasser ces barrières politiques. Les valeurs du sport doivent rassembler et non diviser. Nous avons tant appris de nos athlètes au cours de ces 15 jours ; ils se surpassent pour atteindre des objectifs incroyables. J’espère que ces Jeux de Paris permettront à toute la population de changer son regard envers les personnes en situation de handicap afin d’être plus inclusive.

Merci beaucoup Yohan pour ton temps et cette interview très complète !